La méthode de Singapour

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C’est malheureusement devenu banal : alors que la France chute régulièrement dans les classements internationaux évaluant, pays par pays, le niveau des élèves en sciences, les élèves de Singapour se sont imposés comme les meilleurs du monde en mathématiques (étude PISA, Etude TIMSS - Trends in International Mathematics and Sciences Studies).

Un miracle ? Non, une méthode, la fameuse « Méthode de Singapour » une méthode de mathématiques complète pour le primaire, inspirée des livres conçus par le Ministère de l’Education de Singapour, utilisée aujourd’hui dans plus de soixante pays… et pas moins de 2000 écoles en France. Alors : dernier concept à la mode, ou méthode révolutionnaire ?

En quoi consiste la méthode de Singapour

Le principe est simple : les notions (addition, multiplication, fractions, nombres décimaux, etc.) sont étudiées en profondeur, à l’aide de problèmes à résoudre, jusqu'à ce que les élèves les maîtrisent complètement.

 La démarche est structurée en 3 phases :

   Etape concrète: Les élèves sont d’abord confrontés aux notions mathématiques par la manipulation d’objets. (Par exemple des cubes ou des jetons). 

   Etape imagée: Les objets sont remplacés par des images qui les représentent. Ainsi, une pile de dix cubes représentent le nombre dix, puis une pièce de dix centimes, etc.

   Etape abstraite : Lorsque les élèves se sont familiarisés avec les concepts de la leçon, ils ne travaillent plus qu’à l’aide de chiffres et de symboles.

En effet, le principal enjeu de l’enseignement des mathématiques au primaire est d’aider les élèves à passer du monde concret qui leur est familier à une vision abstraite. 

Souvent, cette étape essentielle du passage du concret à l’abstrait est trop vite passée, pour aborder immédiatement les symboles écrits. Il s’agit ici de rendre explicites les ponts entre les manipulations concrètes du primaire et les mathématiques abstraites du secondaire et du supérieur.

Dessiner des modèles

Pour résoudre un problème, les élèves sont encouragés à dessiner des modèles, dessiner une représentation visuelle de la question qui leur est posée. Concrètement, ils vont dessiner des barres de différentes longueurs afin de déterminer quelles quantités sont données dans l’énoncé, quelles quantités sont inconnues, et quelles opérations vont les aider à trouver la solution.

Par exemple, en permettant de se créer une image mentale de ce que sont les fractions, un jeu comme le jeu des pizzas permet à l’enfant d’intégrer plus facilement la réalité de cette notion. C’est pourquoi les outils mathématiques comme les cubes, les réglettes, les fractions en cercle, etc., sont très présents dans la mise en application de cette méthode.

La méthode de Singapour procède par « petites touches » : chaque notion est d’abord présentée puis, l’année d’après, approfondie, et ainsi de suite.

Par exemple, la division est enseignée dès le CP mais de manière très simple, sur des chiffres inférieurs à 20. Le symbole ÷ n’est introduit qu’au CE1, et les divisions avec reste au CE2. Le fait d’introduire des notions de façon très simple puis de les revoir en profondeur l’année d’après permet aux élèves de ne pas avoir d’appréhension lorsqu'une nouvelle notion est enseignée. Cette approche permet de poser des fondations solides, qui sont sans cesse révisées avant d’être approfondies et permet à tous les élèves, même les moins « matheux », de progresser en toute confiance.

Méthode de Singapour, évolution ou révolution ?

La méthode de Singapour ne prétend pas révolutionner l’enseignement des mathématiques. D'ailleurs, les programmes de l’éducation nationale s’articulent d’ores et déjà autour de verbes d’action (chercher, modéliser, représenter, raisonner, communiquer, calculer…) qui rejoignent parfaitement l’approche de Singapour !

Rien de révolutionnaire à tout ça, donc, mais la grande qualité de la méthode réside précisément dans le bon équilibre entre tous les ingrédients (verbalisation, manipulation, modélisation, problèmes ouverts, travail collaboratif, etc.) et dans la progression bien pensée des objectifs didactiques, au cours d’une année et d’année en année.

Au final, la Méthode de Singapour aborde la notion essentielle : « Que signifie l’apprentissage des mathématiques en primaire ? ». Là où l’enseignement traditionnel se focalise sur le « comment » (comment additionner, comment trouver une fraction équivalente, etc.), l’idée qui sous-tend la Méthode de Singapour est plutôt qu’il faut enseigner aux enfants à penser mathématiquement, à résoudre des problèmes stimulants, à représenter des notions de façons multiples, à communiquer leurs idées… évident, non ?